Un très beau texte qui dit des choses tellement justes.
Lettre à ma génération : moi je n'irai pas qu'en terrasse
Salut, On se connaît pas mais
je voulais quand même t’écrire. Il paraît qu’on devrait se comprendre,
puisqu’on est de la même génération. Je suis française, je n’ai pas
trente ans. Paris, c’est ma ville. J’ai grandi dans une école
internationale où on était plus de quatre-vingt nationalités. J’ai
beaucoup voyagé et je parle plusieurs langues. J’ai « des origines »
comme on dit maghrébines. Je suis auteur compositeur interprète,
artiste, et même un peu anthropologue.
J’ai toujours adoré les terrasses. La dernière fois que j’étais à Paris j’y ai passé des heures, dans les cafés des 10e 11e et 18e arrondissements. J’y ai écrit un livre qui s’appelle Chroniques de terrasse. Il est maintenant quelque part dans la pile de manuscrits de plusieurs maisons d’édition. Ça fait drôle d’y penser maintenant. J’aurais envie de rajouter quelques pages. Pourtant aujourd’hui, ce n’est pas en terrasse que j’ai envie d’aller.
Depuis plusieurs jours, on m’explique que c’est la liberté, la mixité et la légèreté de cette jeunesse qui a été attaquée, et que pour résister, il faut tous aller se boire des bières en terrasse. C’est joli comme symbole, c’est même plutôt cool comme mode de résistance. Je ne suis pas sûre que si les attentats prévus à la Défense avaient eu lieu, on aurait lancé des groupes facebook « TOUS EN COSTAR AU PIED DES GRATTE-CIELS ! » ni qu'on aurait crié notre fierté d’être un peuple d’employés et de patrons fiers de participer au capitalisme mondial, pas toi ?
On nous raconte qu’on a été attaqués parce qu’on est le grand modèle de la liberté et de la tolérance. De quoi se gargariser et mettre un pansement avec des coeurs sur la blessure de notre crise identitaire. Sauf qu'il existe beaucoup d’autres pays et de villes où la jeunesse est mixte, libre et festive. Vas donc voir les terrasses des cafés de Berlin, d’Amsterdam, de Barcelone, de Toronto, de Shanghai, d’Istanbul, de New York !
On a été attaqués parce que la France est une ancienne puissance coloniale du Moyen-Orient, parce que la France a bombardé certains pays en plongeant une main généreuse dans leurs ressources, parce que la France est accessible géographiquement, parce que la France est proche de la Belgique et qu’il est facile aux djihadistes belges et français de communiquer grâce à la langue, parce que la France est un terreau fertile pour recruter des djihadistes.
Oui je sais, la réalité est moins sexy que notre fantasme. Mais quand on y pense, c’est tant mieux, car si on a été attaqué pour ce qu’on est, alors on ne peut pas changer grand chose. Mais si on a été attaqué pour ce qu'on fait, alors on a des leviers d’action :
- S'engager dans la recherche pour trouver des énergies renouvelables, car quand le pétrole ne sera plus le baromètre de toute la géopolitique, le Moyen-Orient ne sera plus au centre de nos attentions. Et d'un coup le sort des Tibétains et des Congolais nous importera autant que celui des Palestiniens et des Syriens.
- S'engager pour trouver de nouveaux modèles politiques afin de ne plus déléguer les actions de nos pays à des hommes et des femmes formés en école d'administration qui décident que larguer des bombes, parfois c'est bien, ou qu'on peut commercer avec un pays qui n'est finalement qu'un Daesh qui a réussi.
- Les journalistes ont montré que les attentats ont éveillé des vocations de policiers chez beaucoup de jeunes. Tant mieux. Mais où sont les vocations d’éducateurs, d’enseignants, d’intervenants sociaux, de ceux qui empêchent de planter la graine djihadiste dans le terreau fertile qu’est la France ?
Si la seule réponse de la jeunesse française à ce qui deviendra une menace permanente est d’aller se boire des verres en terrasse et d'aller écouter es concerts, je ne suis pas sûre qu’on soit à la hauteur du symbole qu’on prétend être. L'attention que le monde nous porte en ce moment mériterait que l'on sorte de la jouissance de nos petits plaisirs personnels.
Ma mixité
Qu’on soit maghrébin, français, malien, chinois, kurde, musulman, juif, athée, bi homo ou hétéro, nous sommes tous les mêmes dès lors qu'on devient de bons petits soldats du néo-libéralisme et de la surconsommation. On aime le Nutella qui détruit des milliers d’hectares de forêt et décime les populations amazoniennes, on achète le dernier iphone et on grandit un peu plus les déchets avec les carcasses de nos anciens téléphones, on préfère les fringues pas chères teintes par des enfants du Bengladesh et de Chine, on dépense des centaines d'euros en maquillage testé sur les animaux et détruisant ce qu'il reste de ressources naturelles.
Ma mixité, ce sera d’aller à la rencontre de gens vraiment différents de moi. Des gens qui vivent à huit dans un deux pièces, peu importe leur origine et leur religion. Des enfants dans les hôpitaux, des détenus dans les prisons. Des vieilles femmes qui vivent seules. De ce gamin de douze ans à l'écart d'un groupe d'amis, toujours rejeté parce qu'il joue mal au foot, qui se renferme déjà sur lui-même. Des ados dans les banlieues qui ne sont jamais allés voir une pièce de théâtre. Ceux qui vivent dans des petits villages reculés où il n'y a plus aucun travail. Les petits caïds de carton qui s'insultent et en viennent aux mains parce que l'un n'a pas payé son cornet de frites au McDo. D'habitude quand ça arrive, qu'est-ce que tu fais ? Tu tournes la tête, tu ris, tu te rassures avec un petit "Et ben ça chauffe !" et tu retournes à ta conversation. Si tous ceux qui ont répondu à l'appel Tous en terrasse ! décidaient de consacrer quelques heures par semaine à ce type d'échange... il me semble que ça irait déjà mieux. Ça apportera à l'humanité sans doute un peu plus que la bière que tu bois en terrasse.
Ma liberté
Je ne vois pas en quoi faire partie du troupeau qui se rend chaque semaine aux messes festives du weekend est une marque de liberté. Ma liberté sera de prendre un autre chemin que celui qui passe par l’hyperconsommation. D’avoir un autre horizon que celui de la maison, de la voiture, des grands écrans, des vacances au soleil et du shopping.
Ma liberté sera celle de prendre le temps quand j'en ai envie, de ne pas m'affaler devant la télé en rentrant du boulot, d'avoir un travail qui ne me permet pas de savoir à quoi ressemblera ma journée.
Ma liberté, c'est de savoir que lorsque je voyage dans un pays étranger je ne suis pas en train de le défigurer un peu plus. C'est vivre quelque part où le ciel a encore ses étoiles la nuit. C'est flâner dans ma ville au hasard des rues. C'est avoir pu approcher une autre espèce que la mienne dans son environnement naturel.
Ma liberté, ce sera de savoir jouir et d'être plein, tout le contraire des plaisirs de la consommation qui créent un manque et le besoin de toujours plus. Ma liberté, ce sera d'avoir essayé de m'occuper de la beauté du monde. "Pour que l'on puisse écrire à la fin de la fête que quelque chose a changé pendant que nous passions" (Claude Lemesle).
Ma fête
Ma fête ne se trouve pas dans l’industrie du spectacle. Ma fête c'est quand j'encourage les petites salles de concert, les bars où le musicien joue pour rien, les petits théâtres de campagne construits dans une grange, les associations culturelles. Passer une journée avec un vieux qui vit tout seul, c’est une fête. Offrir un samedi de babysitting gratuit à une mère qui galère toute seule avec ses enfants, c’est une fête. Organiser des rencontres entre familles des quartiers défavorisés et familles plus aisées, et écouter l'histoire de chacun, c'est une fête.
La fête c’est ce qui sort du quotidien. Et si mon quotidien est de la consommation bruyante et lumineuse, chaque fois que je cultiverai une parole sans écran et une activité dont le but n’est pas de consommer, je serai dans la fête. Préparer un bon gueuleton, jouer de la gratte, aller marcher en forêt, lire des nouvelles et des contes à des jeunes qui sentent qu’ils ne font pas partie de notre société, quelle belle teuf !
N’allez pas me dire que je fais le jeu des djihadistes qui disent que nous sommes des décadents capitalistes… s’il vous plaît ! Ils n’ont pas le monopole de la critique de l’hyper-consommation, et de toute façon, ils boivent aux mêmes sources que les pays les plus capitalistes : le pétrole et le trafic d’armes.
Voilà. Je ne sais pas si on se croisera sur les mêmes terrasses ni dans les mêmes fêtes. Mais je voulais juste te dire que tu as le droit de te construire autrement que l'image que les médias te renvoient. Bien sûr qu'il faut continuer à aller en terrasse, mais qu'on ne prenne pas ce geste pour autre chose qu'une résistance symbolique qui n'aura que l'effet de nous rassurer, et sûrement pas d'impressionner les djihadistes (apparemment ils n'ont pas été très impressionnés par la marche du 11 janvier), et encore moins d'arrêter ceux qui sont en train de naître.
Ce qu’on est en train de vivre mérite que chacun se pose un instant à la terrasse de lui-même, et lève la tête pour regarder la société où il vit. Et qui sait... peut-être qu'un peu plus loin, dans un lambeau de ciel blanc accroché aux immeubles, il apercevra la société qu’il espère.
Sarah
J’ai toujours adoré les terrasses. La dernière fois que j’étais à Paris j’y ai passé des heures, dans les cafés des 10e 11e et 18e arrondissements. J’y ai écrit un livre qui s’appelle Chroniques de terrasse. Il est maintenant quelque part dans la pile de manuscrits de plusieurs maisons d’édition. Ça fait drôle d’y penser maintenant. J’aurais envie de rajouter quelques pages. Pourtant aujourd’hui, ce n’est pas en terrasse que j’ai envie d’aller.
Depuis plusieurs jours, on m’explique que c’est la liberté, la mixité et la légèreté de cette jeunesse qui a été attaquée, et que pour résister, il faut tous aller se boire des bières en terrasse. C’est joli comme symbole, c’est même plutôt cool comme mode de résistance. Je ne suis pas sûre que si les attentats prévus à la Défense avaient eu lieu, on aurait lancé des groupes facebook « TOUS EN COSTAR AU PIED DES GRATTE-CIELS ! » ni qu'on aurait crié notre fierté d’être un peuple d’employés et de patrons fiers de participer au capitalisme mondial, pas toi ?
On nous raconte qu’on a été attaqués parce qu’on est le grand modèle de la liberté et de la tolérance. De quoi se gargariser et mettre un pansement avec des coeurs sur la blessure de notre crise identitaire. Sauf qu'il existe beaucoup d’autres pays et de villes où la jeunesse est mixte, libre et festive. Vas donc voir les terrasses des cafés de Berlin, d’Amsterdam, de Barcelone, de Toronto, de Shanghai, d’Istanbul, de New York !
On a été attaqués parce que la France est une ancienne puissance coloniale du Moyen-Orient, parce que la France a bombardé certains pays en plongeant une main généreuse dans leurs ressources, parce que la France est accessible géographiquement, parce que la France est proche de la Belgique et qu’il est facile aux djihadistes belges et français de communiquer grâce à la langue, parce que la France est un terreau fertile pour recruter des djihadistes.
Oui je sais, la réalité est moins sexy que notre fantasme. Mais quand on y pense, c’est tant mieux, car si on a été attaqué pour ce qu’on est, alors on ne peut pas changer grand chose. Mais si on a été attaqué pour ce qu'on fait, alors on a des leviers d’action :
- S'engager dans la recherche pour trouver des énergies renouvelables, car quand le pétrole ne sera plus le baromètre de toute la géopolitique, le Moyen-Orient ne sera plus au centre de nos attentions. Et d'un coup le sort des Tibétains et des Congolais nous importera autant que celui des Palestiniens et des Syriens.
- S'engager pour trouver de nouveaux modèles politiques afin de ne plus déléguer les actions de nos pays à des hommes et des femmes formés en école d'administration qui décident que larguer des bombes, parfois c'est bien, ou qu'on peut commercer avec un pays qui n'est finalement qu'un Daesh qui a réussi.
- Les journalistes ont montré que les attentats ont éveillé des vocations de policiers chez beaucoup de jeunes. Tant mieux. Mais où sont les vocations d’éducateurs, d’enseignants, d’intervenants sociaux, de ceux qui empêchent de planter la graine djihadiste dans le terreau fertile qu’est la France ?
Si la seule réponse de la jeunesse française à ce qui deviendra une menace permanente est d’aller se boire des verres en terrasse et d'aller écouter es concerts, je ne suis pas sûre qu’on soit à la hauteur du symbole qu’on prétend être. L'attention que le monde nous porte en ce moment mériterait que l'on sorte de la jouissance de nos petits plaisirs personnels.
Qu’on soit maghrébin, français, malien, chinois, kurde, musulman, juif, athée, bi homo ou hétéro, nous sommes tous les mêmes dès lors qu'on devient de bons petits soldats du néo-libéralisme et de la surconsommation. On aime le Nutella qui détruit des milliers d’hectares de forêt et décime les populations amazoniennes, on achète le dernier iphone et on grandit un peu plus les déchets avec les carcasses de nos anciens téléphones, on préfère les fringues pas chères teintes par des enfants du Bengladesh et de Chine, on dépense des centaines d'euros en maquillage testé sur les animaux et détruisant ce qu'il reste de ressources naturelles.
Ma mixité, ce sera d’aller à la rencontre de gens vraiment différents de moi. Des gens qui vivent à huit dans un deux pièces, peu importe leur origine et leur religion. Des enfants dans les hôpitaux, des détenus dans les prisons. Des vieilles femmes qui vivent seules. De ce gamin de douze ans à l'écart d'un groupe d'amis, toujours rejeté parce qu'il joue mal au foot, qui se renferme déjà sur lui-même. Des ados dans les banlieues qui ne sont jamais allés voir une pièce de théâtre. Ceux qui vivent dans des petits villages reculés où il n'y a plus aucun travail. Les petits caïds de carton qui s'insultent et en viennent aux mains parce que l'un n'a pas payé son cornet de frites au McDo. D'habitude quand ça arrive, qu'est-ce que tu fais ? Tu tournes la tête, tu ris, tu te rassures avec un petit "Et ben ça chauffe !" et tu retournes à ta conversation. Si tous ceux qui ont répondu à l'appel Tous en terrasse ! décidaient de consacrer quelques heures par semaine à ce type d'échange... il me semble que ça irait déjà mieux. Ça apportera à l'humanité sans doute un peu plus que la bière que tu bois en terrasse.
Ma liberté
Je ne vois pas en quoi faire partie du troupeau qui se rend chaque semaine aux messes festives du weekend est une marque de liberté. Ma liberté sera de prendre un autre chemin que celui qui passe par l’hyperconsommation. D’avoir un autre horizon que celui de la maison, de la voiture, des grands écrans, des vacances au soleil et du shopping.
Ma liberté sera celle de prendre le temps quand j'en ai envie, de ne pas m'affaler devant la télé en rentrant du boulot, d'avoir un travail qui ne me permet pas de savoir à quoi ressemblera ma journée.
Ma liberté, c'est de savoir que lorsque je voyage dans un pays étranger je ne suis pas en train de le défigurer un peu plus. C'est vivre quelque part où le ciel a encore ses étoiles la nuit. C'est flâner dans ma ville au hasard des rues. C'est avoir pu approcher une autre espèce que la mienne dans son environnement naturel.
Ma liberté, ce sera de savoir jouir et d'être plein, tout le contraire des plaisirs de la consommation qui créent un manque et le besoin de toujours plus. Ma liberté, ce sera d'avoir essayé de m'occuper de la beauté du monde. "Pour que l'on puisse écrire à la fin de la fête que quelque chose a changé pendant que nous passions" (Claude Lemesle).
Ma fête
Ma fête ne se trouve pas dans l’industrie du spectacle. Ma fête c'est quand j'encourage les petites salles de concert, les bars où le musicien joue pour rien, les petits théâtres de campagne construits dans une grange, les associations culturelles. Passer une journée avec un vieux qui vit tout seul, c’est une fête. Offrir un samedi de babysitting gratuit à une mère qui galère toute seule avec ses enfants, c’est une fête. Organiser des rencontres entre familles des quartiers défavorisés et familles plus aisées, et écouter l'histoire de chacun, c'est une fête.
La fête c’est ce qui sort du quotidien. Et si mon quotidien est de la consommation bruyante et lumineuse, chaque fois que je cultiverai une parole sans écran et une activité dont le but n’est pas de consommer, je serai dans la fête. Préparer un bon gueuleton, jouer de la gratte, aller marcher en forêt, lire des nouvelles et des contes à des jeunes qui sentent qu’ils ne font pas partie de notre société, quelle belle teuf !
N’allez pas me dire que je fais le jeu des djihadistes qui disent que nous sommes des décadents capitalistes… s’il vous plaît ! Ils n’ont pas le monopole de la critique de l’hyper-consommation, et de toute façon, ils boivent aux mêmes sources que les pays les plus capitalistes : le pétrole et le trafic d’armes.
Voilà. Je ne sais pas si on se croisera sur les mêmes terrasses ni dans les mêmes fêtes. Mais je voulais juste te dire que tu as le droit de te construire autrement que l'image que les médias te renvoient. Bien sûr qu'il faut continuer à aller en terrasse, mais qu'on ne prenne pas ce geste pour autre chose qu'une résistance symbolique qui n'aura que l'effet de nous rassurer, et sûrement pas d'impressionner les djihadistes (apparemment ils n'ont pas été très impressionnés par la marche du 11 janvier), et encore moins d'arrêter ceux qui sont en train de naître.
Ce qu’on est en train de vivre mérite que chacun se pose un instant à la terrasse de lui-même, et lève la tête pour regarder la société où il vit. Et qui sait... peut-être qu'un peu plus loin, dans un lambeau de ciel blanc accroché aux immeubles, il apercevra la société qu’il espère.
Sarah
Evidemment que notre génération repliée sur ces petits plaisirs (mais qui en a pris pleins la gueule depuis toujours aussi) doit agir/résister/s'indigner. J'ai fait le même constat que Sarah, et depuis Charlie je me bouge, avec mes moyens. Cela dit, je crois que l'appel à la terrasse est un peu plus chargée symboliquement que la préservation des libertés individuelles ou un acte de réassurance. Sarah, l'anthropologue, doit savoir qu'à part l'école et les cafés (et le mac do :-), il n'y a plus d'espaces de mixité, en France. Aller en terrasse boire des coups s'est se montrer ouverte à la ville, à l'autre. Ce n'est pas une consommation "hyper" inutile et malsaine. Sarah prône aussi un mode de vie bien culpabilisant et bien pensant, à sa manière. La sécurité et le retour à la morale ne sont pas pour moi la solution pour notre génération.
RépondreSupprimercontinuer à aller boire des coups en terrasse, oui, bien sûr! Le faire encore plus en ce moment pour le symbole et car ça fait du bien, oui aussi!. Je ne veux pas répondre à la place de l'auteure de ce texte, mais il me semble qu'elle pointe du doigt le fait que cela ne suffit pas et que cela ne doit pas être l'unique réponse. Boire un verre sur une terrasse du Canal st Martin n'est ni malsain ni inutile et loin d'elle je pense (et de moi en tous cas) l'idée de bouder ces plaisirs de la vie, la convivialité, les moments partagés entre amis. Mais il est vrai que ce sont des lieux où nous sommes ouverts à nos semblables, ceux de l'est parisien, et cela ne fait pas bien avancer les choses. Même s'ils sont nécessaires, ces moments sont ceux de plaisirs individuels.
SupprimerTu dis qu'il n'y a plus d'espaces de mixité en france… il y en a peu certes, mais elle nous invite à faire l'effort de les chercher. Je connais au moins une association de forte mixité sociale/religieuse/culturelle dans mon quartier du 11e. Je m'y investis, mais bien trop peu et je lis le message de Sarah comme un appel à se pousser aux fesses, à ne pas se contenter de parler et de brandir notre drapeau de belles valeurs (liberté, solidarité…) mais de les mettre davantage en pratique dans notre vie quotidienne. Je ne la trouve pas moralisatrice car dans ce texte, elle semble aussi se parler à elle-même. Je ne vois aucune notion de sécurité ni de retour à la morale. J'y vois une invitation (faite à elle-même et aux autres) à réfléchir sur notre manière d'être et d'agir, individuellement, dans la société.
Je pense aussi qu'il y aura plusieurs étapes dans la réaction aux horribles attentats de la semaine dernière. L'appel à fréquenter les terrasses, à se réunir, à continuer à rire, à sortir… a été une réaction instinctive salvatrice et très belle d'ailleurs. Avec le temps, quand on ne sera plus complètement sous le choc, viendront sans doute des initiatives, des idées concrètes pour faire bouger les choses en profondeur.
merci Daphné pour ton message et merci d'avoir ouvert ce débat.
Merci pour ta réponse ! Je crois qu'on est tous chamboulé au plus profond de notre ordre symbolique (oui on est aussi les Méchants pour certains). Et il est encore dur de mettre de l'ordre dans nos réactions. Je me suis demandée pourquoi j'avais réagi épidermiquement sur ce texte, et pas sur les autres (pourtant y a un paquet de merdes :-) Je crois que c'est parce que Sarah nous accuse, nous, une comme nous. Et je ne le supporte pas. Et je ne crois pas que de manger bio, aller dans la forêt avec mamie (bon ok je simplifie son texte:-), ou son injonction à agir individuellement (là est la morale) va changer la donne. C'est un problème complexe, collectif auquel il faut une réponse collective. Et je crois que notre énergie doit passer à penser ce collectif, plutôt que de culpabiliser sur notre action individuelle. Nous ne sommes rien, nous sommes tout.
SupprimerAudrey,
RépondreSupprimerJe déteste ce texte. Je le trouve démago, rempli de contres vérités, culpabilisant, déplacé...Je t'ai écrit un long mail à ce sujet. Vraiment, je le déteste.
Je t'embrasse très fort, Hélène
Eh bien moi j'aime bien ce texte, pour son rappel aux sources. Quelle(s) société(s) voulons-nous ? Quelle ouverture de nos esprits ? Quelle considération pour les autres (tous les autres, ici et là-bas) ?
RépondreSupprimerEt j'apprécie particulièrement la ligne sur l'éveil des vocations, que je reprends à mon compte : c'est vrai, pourquoi pas du social (aussi) ?
Merci et bon dimanche (bon, dans ma petite ville il n'y a pas de terrasses chauffées ...).
Albe
Moi aussi j'aime beaucoup ce texte, parce qu'il nous rappelle que nous sommes libres de choisir notre monde, de l'inventer tel qu'on voudrait qu'il soit, qu'on peut choisir, construire, qu'on n'est pas des machines mais des êtres responsables, pensants et agissants.
RépondreSupprimerEt je serais curieuse de savoir ce qui rebute tant dans ce texte, Hélène !
RépondreSupprimerCe qui me rebute dans ce texte, c'est sa démagogie, son retour à la morale, ce sont toutes ces contres vérités (les attentats seraient une réponse à la "France colonialiste...ect..." De quoi la Syrie, le Mali (...) pays non colonialistes et bien plus touchés que nous, sont-ils responsables alors???
RépondreSupprimerLes écoles de travailleurs sociaux refusent chaque année de plus en plus de jeunes tellement les candidats sont nombreux (je sais de quoi je parle, je suis une ancienne formatrice de centre d'éducateurs).Je suis travailleuse sociale, alors qu'elle se renseigne avant de faire la leçon.
Je ne supporte pas cette culpabilité, cette démagogie, ce retour de la morale...
Je n'ai pas attendu ces monstrueux attentats pour réfléchir à notre société capitaliste et de sur consommation.
Je n'ai nullement besoin que l'on me fasse la morale et qu'on me dise quoi et comment penser en ces temps si douloureux.
Je vais aller aux terrasses des cafés, aller aux concerts...En pensant aux victimes et en pensant à la vie.
Et je garde pour moi mes actions et mes convictions politiques. sans faire la leçon aux autres.
Je préfère de plus loin le texte de Baptiste Beaulieu, dont voici un extrait:
Une histoire d'amour(s) après les attentats .
Baptiste Beaulieu
"À toi, le Che Guevara en pyjama qui râle contre la tricolorisation des photos de profil ou contre l'émotion à géométrie variable qui dénoterait un ethnocentrisme insupportable (<> Sans déconner?), je voudrais te dire que je ne pleure que lorsque les victimes sont blanches, blondes aux yeux bleus et appartiennent aux haut du panier de l'échelle sociale. (Quoi, c'est bien ça que tu veux entendre, hein? C'est bien ça que tu supposais ces derniers jours? Non? Parce que si c'est non, tu peux aussi te taire, laisser les autres se consoler comme ils peuvent, et continuer à jouer les révolutionnaires à la petite semaine tout en t'achetant des iPhones fabriqués par de petites mains en Chine ou des vêtements H&M tissés par les gaminous du Bengladesh. Ou tu peux aussi sortir de ta petite zone de confort, enlever tes chaussons et partir faire de l'humanitaire. Ça te permettra d'exister autrement que derrière un écran à traiter les autres de moutons."
Amicalement, Hélène
Moi aussi, ce texte m'a dérangée, assez fort, même si l'intention est sans doute bonne.
RépondreSupprimerMais c'est complexe de vouloir exprimer sa vision de la liberté, car elle semble toujours donner des leçons aux autres.
Un exemple tout simple : Pourquoi opposer les grandes salles de concert aux petits concerts gratos dans les bars ?
Moi je fais les deux.
Est-ce pour autant que ma "liberté" est capitaliste ou manque d'engagement ?
Je ne le crois pas.
Mais l'aspect positif, s'il existe, de ces événements est d'avoir fait beaucoup écrire les gens, et ça je trouve ça bien. Même si on peut pas adhérer à tout, au moins on lit, on écrit, on se questionne, c'est bien.