et pourquoi pas demain

5.3.14

La petite communiste qui ne souriait jamais

{premières lignes}… : "Quel âge a-t-elle, demande la juge principale, incrédule, à l'entraîneur. Ce chiffre, quatorze, lui donne un frisson. Ce que la petite a effectué à l'instant dézingue le déroulement des chiffres, des mots et des images. Il ne s'agit plus de ce que l'on comprend. On ne saurait noter ce qui vient d'advenir. Elle jette la pesanteur par-dessus son épaule, son corps frêle se fait de la place dans l'atmosphère pour s'y lover."


Un très beau roman prêté par Raphaële. L'histoire de Nadia Comaneci, la toute jeune gymnaste roumaine, devenu star planétaire aux JO de Montréal en 1976. Par le jeu d'une construction très habile (alternance d'un récit classique et d'une conversation "imaginaire" entre la sportive et la narratrice, la narratrice étant mise en scène par l'auteure), l'auteur raconte l'histoire fascinante et terrifiante d'une gamine de
7 ans devenue une championne hors-norme, aux exploits littéralement surhumains.
J'ai été gênée, dans les premières pages, par l'écriture qui me donnait l'impression d'un exercice de style trop appuyé et trop visible. Mais on entre finalement doucement dans l'histoire et on ne peut la lâcher. Le livre joue constamment sur la frontière entre l'autobiographie et le roman, le réel et la fiction. On est bien dans le roman, même s'il est ultra documenté.
Le portait, tout en nuance, de cette gamine est fascinant et terriblement prenant. Une petite fille fabriquée, manipulée, utilisée jusqu'à l'usure. Par son entraîneur, par le dictateur de son pays, par les médias du monde entier. Mais le roman nous dit que tout n'est pas si simple et Nadia Comaneci reste un grand mystère. A l'évocation de ce "personnage", s'ajoute l'évocation de la Roumanie communiste et de la folie grandissante de Ceausescu et de sa femme à partir de 1975. Il y a des pages terribles sur la réalité du système communiste (les femmes et jeunes filles du pays, examinées chaque mois par la "police des menstruations", chargée de déceler des tentatives d'avortement- acte condamné- et de les pousser à faire des enfants ; la méfiance constante, les surveillances, la faim, le froid dans les maison, la censure…). L'auteur, par la voix de ses personnages, opère régulièrement des parallèles avec nos sociétés capitalistes et libérales pour rappeler que le système communiste tel qu'il a été mis en place à l'Est n'a pas le monopole de l'horreur et de l'injustice. Un roman brillant, passionnant qui invite à la réflexion.

Lola Lafon sera demain, jeudi 6 mars, à partir de 19h30 à la librairie Les Guetteurs du vent,
108 avenue Parmentier, paris 11e

La petite communiste qui ne souriait jamais, de Lola Lafon (Actes Sud), janvier 2014, 21 €, imprimé en France.

5 commentaires:

  1. Et le voilà ajouté à ma liste... Merci pour le partage

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  2. Trop rigolo ... je l'avais entre les mains cet aprem chez Gibert (le marché de l'occasion c'est quand même pas mal quand on lit beaucoup et quand on a pas beaucoup de ronds)et puis je l'ai reposé sans oublier de l'ajouter à ma liste que je fais dans mon téléphone ! C'était ma "balade repérage", à la recherche des prochaines lectures car j'ai déjà des "en cours" ! :)

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    1. j'aimerais bien ta liste des "en cours" elo! et celle que contient ton téléphone!
      moi aussi j'ai mon Gibert… qui n'est pas Gibert d'ailleurs et qui est tout près de chez moi!. Il faut que j'en parle ici bientôt car c'est une super adresse !
      bises et bonnes lectures…

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  3. Je l'ai repéré et j'avais très envie de le lire. Là, encore plus :-)
    Si Elo l'a laissé sur les étagères de Gibert, qui sait :-D

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  4. je veux le lire, on en dit bcp de bien

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