L'Année de la pensée magique : "un très beau titre" m'a dit le libraire de L'arbre à lettres qui est allé me chercher le livre. L'Année de la pensée magique, c'est celle qui a suivi la mort du mari de Joan Didion. Une année où les pensées sont perturbées, étranges… "Ce n'est qu'au creux de l'été (…) que je m'en suis rendu compte : par moments, au cours de cet hiver et de ce printemps-là, j'étais incapable de penser rationnellement. Je pensais comme pensent les enfants, comme si mes pensées ou ma volonté avaient la force de renverser le cours de l'histoire, d'en changer l'issue. Dans mon cas, cette perturbation mentale était restée secrète, personne d'autre, je crois, ne l'avait remarquée, je me l'étais dissimulée à moi-même, mais elle avait été à la fois irrépressible et constante."
Cet extrait, qui éclaire le titre, est également représentatif du livre de Joan Didion. Cet écrivaine et intellectuelle américaine a commencé à l'écrire quelques mois après la mort de John Gregory Dune, son mari depuis quarante ans. Au moment où il est victime d'une crise cardiaque, leur fille unique, Quitanna, 39 ans, est à l'hôpital dans un état grave. Joan Didion va donc devoir, des mois durant, affronter la mort de l'homme qu'elle aimait et veiller sa fille.
À l'image de cet extrait, l'auteure s'attache à "disséquer" le deuil. Elle est à la fois actrice et spectatrice de ce qui lui arrive. Elle se plonge dans des œuvres psychiatriques, tente de comprendre comment le cerveau peut affronter une telle épreuve. Elle analyse son comportement, ses pensées, sa souffrance. Elle décrit, et c'est terriblement éprouvant, ses moments de panique et d'angoisse, ses stratégies pour éviter les lieux qui lui rappellent des souvenirs. Elle balaye des idées reçues, des images que nous nous faisons du deuil. Comme celle qui consiste à penser que le moment de l'enterrement sera le pire. En une page, merveilleusement écrite (page 232), elle explique l'inverse et conclut ainsi : "Pas plus que nous ne pouvons avoir conscience à l'avance (…) de l'absence infinie qui s'ensuit, le vide, l'exact opposé du sens, la succession interminable de ces moments où nous serons confrontés au contraire même du sens, à l'absurdité ". Une analyse passionnante (et bouleversante) qu'elle mêle à des souvenirs de leurs années de vie commune. Un livre exceptionnel paru en 2005. Elle vient de consacrer un livre à la mort de sa fille, décédée peu après : Le bleu de la nuit, mais j'attendrai avant de le lire. Lire un beau papier ici.
Voici quelques extraits qui m'ont particulièrement touchée (cliquer sur les photos pour un plus grand confort de lecture).
L'Année de la pensée magique, de Joan Didion, Le Livre de Poche, 6,60 euros.
je suis tentée par le bleu de la nuit (j'en ai écouté un extrait lors d'une émission de guillaume gallienne). J'hésite cependant, le sujet est si dur...
RépondreSupprimerJ'ai envie de découvrir les deux ouvrages.
RépondreSupprimerTrès envie même.
Histoire de plonger vers qqch de "vrai" parce que en ce moment, niveau lecture c'est galère.
"La vérité sur l'affaire Harry Quebert" me fait patauger.
Nul. Je l'abandonne, c'est décidé.
Merci pour la découverte.
Bon week-end !
Ah au fait, je sais plus, as-tu lu Venir au monde de Mazzantini ?
Parce qu'il est superbe je trouve !
Moi je viens de finir Le bleu de la nuit et je suis dans Maria avec ou sans rien.
RépondreSupprimerJe l'ai lu. Enfin. Ça faisait longtemps que je voulais. J'ai bu ses mots. Ils coulent en moi. Il est crayonné, de partout. Je n'arrive pas à le quitter. Alors, je le garde encore un peu près de moi. Il reste dans mon sac, je n'arrive pas à le poser, à l'abandonner sur l'étagère. J'ai besoin de lui. Encore un peu.
RépondreSupprimerJe viens de commencer "Le bleu de la nuit".